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Coup de projecteur - Développer une stratégie de tourisme durable dans l'espace Manche

06/01/2022

USAC

(Crédits photo article : P. Torset)


Photo N.Courant2

Entretien avec Noémie Courant, coordinatrice du Géopark d'Armorique, chef de file de UNESCO Sites Across the Channel (USAC).

Comment décririez-vous le projet USAC et son modèle de tourisme durable ?

Le projet USAC implique de nombreux sites désignés par l'UNESCO tels que les Géoparks mondiaux et les Réserves de Biosphère qui appartiennent et dépendent du programme international de l'UNESCO. Nous promouvons avec nos partenaires les labels Réserves de Biosphère et Géoparks de l'UNESCO et développons un nouveau modèle de tourisme durable dans ces sites.

Ces sites naturels sont de bons endroits pour développer un tourisme durable, surtout dans le contexte du Covid-19 car nous avons vu un désir croissant de nature. Dans nos sites, nous avons connu une forte augmentation du nombre de visiteurs désireux de profiter de la nature, du paysage et de la faune et nous savons que cela va continuer. Il faut donc anticiper cette demande en sécurisant ces lieux et en les préparant à un tourisme respectueux de la communauté locale et de l'environnement.

Pour ce faire, nous nous concentrons sur les activités et services touristiques uniques que ces lieux peuvent offrir. Notre approche est innovante car elle créera une identité claire et une nouvelle culture commune, créées par des approches marketing partagées, des activités et des installations touristiques de haute qualité, et soutenues par un modèle économique qui créera une valeur économique ajoutée. Il est important de noter que cela sera reproductible pour d'autres sites de l'UNESCO.

Quels défis avez-vous cherché à relever à travers ce projet ?

Nous voulions aider les projets à surmonter les obstacles pour atteindre le statut UNESCO. Pour devenir nous-mêmes un Géopark mondial UNESCO, nous avons participé à un projet dans une période de programmation antérieure du programme Interreg Atlantic Area. Nous avons eu l'occasion de collaborer avec d'autres Géoparks mondiaux de l'UNESCO dans cette région, tels que le Géopark de la Côte Basque, le Géopark des Açores et les Géoparks irlandais. C'était enrichissant et utile de nouer des contacts et de voir comment les gens travaillent dans ces autres sites en Europe.

Nous avons appris et acquis tellement d'expérience et d'expertise de ces partenaires que nous avons voulus la redonner à d'autres partenaires. Alors actuellement, nous aidons l'AONB Kent Downs et le Parc naturel des Caps et Marais d'Opale à créer ensemble un projet de Géopark mondial transfrontalier et dans 2 ou 3 ans il devrait être labellisé UNESCO grâce à notre soutien. C'est très important car cela pourrait également inspirer d'autres sites et collègues à faire quelque chose de similaire. Nous pensons que les Réserves de Biosphère ou les Géoparks mondiaux sont des lieux d'avenir pour le tourisme et développement durables et pour vivre en harmonie avec la nature et c'est la raison pour laquelle nous pensons qu'il est crucial de rendre le réseau aussi grand que possible.

Quel type de nouvelles expériences touristiques votre projet crée-t-il pour les visiteurs ?

USAC cherche à créer un modèle touristique innovant, rentable et durable pour répondre aux demandes et aux tendances actuelles, qui sont un besoin croissant de nature et une recherche d'activités en plein air et de tourisme local.

Le projet a pour mission de mettre en évidence et de promouvoir de nouvelles activités touristiques sur son site Internet, sur des cartes et dans des guides touristiques et de donner des alternatives aux touristes pour découvrir les territoires. Il ne s'agit pas seulement d'attirer plus de visiteurs mais d'offrir de nouvelles possibilités pour le tourisme dans une approche durable.

Par exemple, le projet a développé et publié en mai un guide, disponible en librairie en France, qui est comme une petite bible sur les territoires. Au fur et à mesure que le touriste part en balade ou en visite, il apprendra beaucoup de choses sur la géologie, la nature, le patrimoine local et le milieu environnant (présence d'écomusées à proximité, etc.). Ce livre de découverte contient une collection de 30 randonnées qui donnent de nouvelles idées amusantes de choses que les visiteurs pourraient faire dans un endroit spécifique.

Nous pensons que les gens veulent et ont besoin de s'engager et s'impliquer dans les endroits qu'ils visitent, nous leur donnons donc l'opportunité d'en apprendre davantage sur les gens, la culture et les traditions de ces régions.

Sur l'île de Wight, les Réserves de Biosphère organisent chaque année de nombreux festivals et expositions. Ils ont développé un festival de marche après le pic de la pandémie de Covid-19 et ont également conçu et organisé un festival spécial lié à la Réserve de Biosphère et engagé des écoles, des artistes, etc. pour célébrer ce qu'est une Réserve de Biosphère.

Dans le Kent Downs, les sites ont déjà de nombreuses activités touristiques, mais ils veulent se concentrer sur la géo-diversité et proposent donc des excursions en Kayak avec un guide donnant des informations sur les falaises locales, la géologie et les différentes espèces.

Pourquoi est-il important de créer plus de sites UNESCO ?

La mission du projet est également de mettre en œuvre un nouveau modèle de tourisme prometteur, durable et économiquement viable pour les générations futures qui peut être transféré à travers la zone FMA et au-delà. Cet héritage durable passera par le développement de 11 nouveaux sites UNESCO transmanche.

C'est important car il existe de nombreuses aires protégées dans le monde (parcs nationaux et régionaux, etc.) et nous partageons les mêmes valeurs, mais nous n'aurons plus de voix que si nous les réunissons pour promouvoir et mettre en valeur les valeurs internationales de l'UNESCO. Afin d'encourager des résultats durables, l'UNESCO n'octroie des labels que si un certain nombre de conditions est atteint, ce qui signifie que les sites UNESCO sont constamment réévalués et amenés à maintenir un standard approprié au fil des années.

Ces sites spéciaux sont importants pour les écosystèmes dont nous dépendons et ils constituent un bon modèle d'inspiration à suivre pour les prochaines décennies, en particulier dans le contexte des changements environnementaux mondiaux.

Comment accompagnez-vous d'autres sites autour de la Manche dans l'obtention du label UNESCO ?

La première chose sur laquelle nous nous concentrons en ce moment est de créer des réseaux de parties prenantes en organisant des réunions physiques et des visites d'étude. Tout territoire outre-Manche, comme les parcs naturels, les parcs nationaux ou les Areas of Outstanding Natural Beauty (AONB), qui souhaite devenir un site désigné par l'UNESCO, peut nous rejoindre ainsi que nos partenaires pour s'engager, s'impliquer et nouer des contacts.

Un autre outil sera de développer une boîte à outils avec du contenu sur les bonnes pratiques et les résultats que nous avons mis en œuvre dans nos parcs, Géoparks ou Réserves de Biosphère. Tout cela sera disponible sur notre site Internet, sur les sites Internet de nos Géoparks et sur les sites Internet de nos partenaires. Nous en ferons la promotion pour nous assurer que ce contenu profitera au plus grand nombre de personnes et de sites possibles. Nous allons également partager des vidéos sur notre site internet pour expliquer les actions que nous avons développées.

Comment la pandémie de Covid-19 a-t-elle impacté votre projet et quelles mesures, le cas échéant, avez-vous prises pour vous adapter ?

Le plus gros défi pour nous était le fait que nous ne pouvions pas nous rencontrer physiquement et organiser des visites, qui sont d'excellents moyens d'acquérir de l'expérience auprès des partenaires, d'apprendre de nouvelles choses et de partager des connaissances. Nous avons donc dû nous organiser différemment et avons commencé à organiser des comités de pilotage virtuels et à présenter ou promouvoir des projets en partageant des photos. Nous avons également fourni de nombreux outils et documents d'orientation pour aider nos partenaires dans la mise en œuvre des projets. Il s'agit de trouver le bon équilibre et de s'assurer que les projets avancent malgré les obstacles.

Avec la pandémie de Covid-19, nous devons également anticiper l'avenir car nous avons constaté une importante augmentation du nombre de touristes visitant nos Réserves de Biosphère et nos Géoparks. Nous accueillons de plus en plus de visiteurs en quête de nature et d'espace, et nous savons que cette envie ne cessera de croître dans les prochaines décennies. Mais les populations locales étant préoccupées par l'augmentation de la fréquentation, notre projet développe des solutions avec des partenaires locaux pour anticiper ces nouveaux enjeux et proposer et promouvoir des alternatives de visites et donc éloigner les flux de visiteurs des sentiers de randonnée surpeuplés ou des zones sensibles.

Par exemple, au lieu de traverser des aires de nidification très importantes pour les oiseaux, les visiteurs seront incités à emprunter un sentier alternatif. Il faut s'adapter et faire en sorte d'alimenter cette nouvelle tendance, en considérant à la fois le développement économique et l'expérience des visiteurs mais aussi la biodiversité et la protection de la nature.

Quelles sont les prochaines étapes pour votre projet ?

La prochaine grande étape consiste à se rencontrer physiquement et à effectuer une visite d'étude avec nos partenaires. Nous avons beaucoup d'actions à présenter et cela fournira de nouvelles idées et perspectives à nos partenaires sur la façon de gérer un site désigné par l'UNESCO.

Nous travaillons également avec l'île de Wight sur une charte d'ambassadeurs qui devrait être prête d'ici fin 2021. Cette charte est dédiée aux ambassadeurs locaux (partenaires locaux tels que les hôtels, les guides nature, les restaurants) et comprendra une liste d'engagements. Nous partageons les mêmes valeurs en matière de protection de la nature, de développement économique et de tourisme durable. Nous souhaitons également que nos partenaires travaillent avec un panel d'ambassadeurs sur leur territoire pour promouvoir le patrimoine local et les expériences touristiques.

Au cours des prochains mois, l'accent sera également mis sur la candidature du projet transfrontalier entre le Kent Downs et le Parc Naturel des Caps et Marais d'Opale pour devenir un Géopark Mondial UNESCO d'ici 2 à 3 ans. Ce sera l'héritage majeur du projet USAC.

USAC est un projet de 1,2M d’euros avec une participation du FEDER de 835 755 euros. Il compte quatre partenaires de projet des deux côtés de la Manche : le Parc Naturel Régional des Caps et Marais d'Opale, le Kent Downs AONB, le Conservatoire d'Espaces Naturels des Hauts-de-France et l’Île de Wight AONB.

Au moment de l'entretien en septembre 2021, le projet en était encore à la première étape de sa mise en œuvre avec deux ans restant avant la livraison finale du projet.

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